La recherche à l’université de Lille

Où en sommes-nous ?

Une université riche de sa diversité culturelle et scientifique

Notre Université peut s’enorgueillir d’une recherche intensive et de qualité portant sur une majorité des champs disciplinaires scientifiques répertoriés dans le classement ARWU (Shangaï). Avec 32 thèmes développés sur les 54 existants, notre Université actuelle se place ainsi au quatrième rang national. Cette dimension multidisciplinaire remarquable doit être maintenue et renforcée, notamment parce qu’elle est le gage du développement de toutes les thématiques de recherche sans exclusivité ni priorisation délétère, qui empêcherait leur indépendance scientifique de s’exprimer pleinement. La création de l’Université de Lille 2022 renforcera encore cette multidisciplinarité, puisque presque toutes les facettes de la recherche seront réunies dans un même établissement public comprenant, outre les composantes de l’actuelle Université de Lille, l’ESJ-Lille, l’ENSAIT, l’ENSAP-Lille et Sciences Po-Lille.

Vers quoi voulons-nous aller ?

Nos principaux objectifs, pour la mandature à venir, sont les suivants.

1) Faire émerger davantage de projets de recherche innovants se situant aux interfaces.

C’est le pari que nous faisons, et nous soutiendrons toutes les initiatives allant dans ce sens au sein de notre nouvel établissement. Dans cette perspective, l’I-SITE doit être un outil d’ouverture et d’incitation fort en lien avec les actuelles écoles doctorales ainsi que les futures « graduate schools », qui articuleront masters et doctorats. Il favorisera les sujets de recherche doctorale pluri-, inter- et transdisciplinaires sur des thématiques comme, par exemple, le développement durable, ou le dialogue entre les arts et les sciences.

La très récente signature d’une lettre d’intention commune entre Le Fresnoy-Studio national des arts contemporains et l’Université de Lille, en vue d’une convention d’association, est typique de ce que nous voulons développer en matière de renforcement des partenariats et échanges avec les acteurs artistiques et culturels du territoire.

Cette orientation forte, que nous soutenons et accompagnerons, ne remet toutefois pas en question les recherches disciplinaires existant au sein des unités de recherche. Les ancrages disciplinaires sont en effet aussi des marqueurs essentiels, qui permettent de se positionner au sein d’un domaine scientifique. Nos unités de recherche et les productions des chercheurs et chercheuses de notre Université ont acquis au fil des années une reconnaissance nationale et internationale pour la qualité de leurs travaux. L’orientation que nous soutenons se place ici en complémentarité de la recherche existante et vise une augmentation et une valorisation des collaborations possibles au sein d’une université pluridisciplinaire dont le potentiel est très important.

Ces recherches aux interfaces requièrent par ailleurs une réflexion sur la structuration même des études doctorales et la possibilité, pour un ou une doctorant·e, de s’insérer dans une école doctorale (ou équivalent) à même d’accueillir des projets inter- et transdisciplinaires. Il s’agira également d’étudier la possibilité, pour une même unité de recherche, d’émarger à plusieurs écoles doctorales.

2) Une politique volontariste en ce qui concerne le nombre de doctorant·e·s.

L’Université de Lille est l’acteur majeur de la formation à et par la recherche dans la région des Hauts-de-France. Elle contribue actuellement au financement annuel de 105 nouveaux contrats doctoraux, pour un budget trisannuel d’un peu plus de 10 M€. Pour que notre nouvelle Université devienne un établissement majeur de la formation à et par la recherche au niveau national, le nombre de contrats doctoraux doit cependant croître. En effet, malgré une augmentation, enclenchée par l’I-SITE, du nombre de doctorantes et doctorants entre 2020 et 2021, l’Université de Lille, avec environ 1900 doctorant·e·s inscrit·e·s par an (toutes années de doctorat confondues, avec ou sans financement) reste encore loin des standards des universités de recherche nationales. Par exemple, Aix-Marseille-Université, d’une taille équivalente à la nôtre, en compte annuellement environ 2700. Le financement de 3000 doctorantes et doctorants doit être notre objectif. Les projets GRAEL (Graduate Research and Education in Lille) et PEARL (Programme for Early-stage Researchers in Lille), dont l’Université et ses partenaires de l’I-SITE ont été lauréats y contribueront, mais ne suffiront pas à atteindre cet objectif, et nous aurons besoin d’un soutien fort de notre écosystème, tutelles y compris. En particulier, le dispositif des thèses CIFRE sera encouragé.

3) La mise en place d’un pôle « Ingénierie » au sein de notre nouvel établissement.

À compter du 1er janvier 2022, notre Université disposera d’une force conséquente en matière d’ingénierie sur la place lilloise. C’est vrai de la formation, mais aussi de la recherche. Nous souhaitons par conséquent mettre en place un pôle « ingénierie » fédérant toutes les forces vives présentes au sein de notre nouvelle Université. La création de ce pôle permettra de jeter les bases d’une recherche scientifique et technologique intensive dans tous les domaines de l’ingénierie, et favorisera l’innovation technologique et le transfert des résultats de la recherche vers l’entreprise et la société. La constitution de ce pôle au sein de l’Université de Lille n’est pas contradictoire avec la poursuite d’un dialogue avec l’École Centrale Lille, bien au contraire.

À cet égard, on ne peut qu’être surpris que le destin du pôle ingénierie soit d’ores et déjà scellé, sur le site de l’Université de Lille 2022, avec une annonce parue … le 1er janvier 2024 : https://www.universitedelille2022.fr/agenda/detail-agenda/creation-de-linstitut-dingenierie-centrale-lille.

4) Une dotation récurrente et pérenne aux unités de recherche, plateformes technologiques et autres structures d’appui à la recherche.

Ces entités sont les pierres angulaires de la recherche à l’Université. C’est à leur niveau que germent les idées scientifiques et l’innovation technologique, que s’effectue la formation des doctorant·e·s et que se produit la connaissance qui fait évoluer notre société tout entière. Dans un contexte de raréfaction des moyens financiers et la pression sans cesse plus forte d’un financement de la recherche sur projets sur un temps court (3 ou 4 ans le plus souvent), il est indispensable que la dotation récurrente apportée par l’Université aux unités de recherche, aux plateformes technologiques et autres structures d’appui soit calculée sur la base d’indicateurs objectifs, fiables et connus de toutes et tous. Ainsi ces structures en disposeront afin de développer, dans le cadre de la politique globale de l’établissement, leur propre politique scientifique ou de moyens selon les éléments stratégiques qui leur sont propres.

5) La défense du label I-SITE et l’intégration de ce programme dans l’Université de Lille.

L’obtention du label I-SITE en 2017 a été un atout essentiel pour l’Université de Lille. Ce label doit absolument être maintenu pour notre Université en 2022. Les moyens financiers supplémentaires (15 M€/an) qu’il apporte à notre communauté universitaire peuvent paraître modestes eu égard à la sous-dotation chronique de notre établissement, mais ils permettent de financer des actions spécifiques pour lesquels l’Université aurait bien du mal de dégager des moyens propres. Néanmoins, à ce jour, cet outil apparaît trop éloigné, inatteignable et finalement peu ouvert pour bon nombre de collègues. Alors qu’il doit être un outil permettant de faire progresser l’Université de manière globale, il est perçu comme un système de différenciation interne qui distinguerait les bons et les moins bons et accorderait ses subsides aux premiers uniquement. Cela tient au fait que ce projet est actuellement porté par une fondation créée à cet effet.

Dans sa nouvelle configuration, l’Université de Lille représentera la quasi-totalité des forces impliquées dans la construction de l’I-SITE. Dans ce contexte en évolution, nous défendons son intégration directement dans l’Université le plus rapidement possible en 2022. Cette intégration en gestion directe par l’Université sera à même de rendre plus transparentes la gouvernance, la politique scientifique et d’attribution des moyens, ou encore la politique d’évaluation des projets soutenus. L’objectif ici affiché est de susciter l’intérêt du plus grand nombre de collègues pour cet outil de soutien de la recherche, ce qui se traduira dans les réponses aux appels à projets et la répartition des aides financières octroyées.

6) Un soutien aux jeunes collègues qui entrent dans la carrière d’enseignant-chercheur.

L’entrée en fonction des jeunes collègues enseignants-chercheurs s’accompagne souvent rapidement d’une surcharge de travail qui rend difficile la conciliation entre les activités pédagogiques et les activités de recherche. De plus les conditions salariales de début de carrière, malgré la prise en compte des activités postdoctorales et les revalorisations liées au protocole carrière de la Loi de Programmation de la Recherche, ne sont pas à la hauteur de la formation suivie pour y accéder, des fonctions exercées et de l’expérience acquise lors de la thèse de doctorat et souvent aussi lors des contrats postdoctoraux. Pour autant que nous y autorise la composante 3 du Régime Indemnitaire des Personnels Enseignants et Chercheurs (RIPEC) institué par le protocole carrière de la LPR (cette composante prévoit une prime individuelle « liée à la qualité des activités et à l’engagement professionnel des agents au regard des missions définies pour les enseignants-chercheurs » englobant l’actuelle PEDR revisitée dans sa durée et une prime pouvant être servie pour un engagement fort en pédagogie), nous étudierons la possibilité d’attribuer aux collègues néo-titularisé·e·s la PEDR pour une durée de 3 ans, convertible en décharge de service. Cette disposition, qui rejoint la question des moyens, s’applique au CNRS depuis plusieurs années pour les nouveaux et nouvelles chargé·e·s de recherches.

7) Maintien ou retour à l’activité de recherche.

Parallèlement aux efforts permettant de dynamiser la recherche de nos jeunes collègues, réussir à dégager du temps dédié à la recherche pour les collègues déjà en poste reste un enjeu capital. Trop de collègues se trouvent actuellement happés par une activité d’enseignement trop importante et des responsabilités pédagogiques lourdes. Or, ce glissement se fait quasi systématiquement au détriment de leur activité de recherche, surtout si le financement de leurs travaux n’est pas assuré de façon pérenne. Le suivi de carrière tel qu’il est actuellement réalisé par le CNU perd tout intérêt s’il ne s’assortit pas d’un dispositif interne à l’Université accompagnant les collègues qui ont dû délaisser leurs activités de recherche. La proposition est de mettre sur pied une telle cellule d’accompagnement, associant, en tant que de besoin, les directions de composantes et d’unités de recherche, les plateformes technologiques et les structures de valorisation de la recherche, afin que tout collègue dans cette situation puisse à nouveau participer à l’effort scientifique de l’établissement.

Par ailleurs, il conviendra de négocier nationalement pour que les compensations financières versées, pour l’essentiel, par le MESRI, les EPST et l’IUF soient augmentées. Actuellement, les CRCT octroyés par le MESRI, les délégations, les ERC sont compensés entre 3 936 € et 11 500 € par semestre selon les organismes. Or, le coût moyen semestriel d’un ATER est d’environ 23 000 €. Cela signifie qu’à chaque fois qu’un ou une collègue bénéficie d’une décharge d’enseignement au titre d’un de ces dispositifs de recherche, lesquels sont essentiels pour une université de recherche forte, les heures d’enseignement, dont sont déchargé·e·s ces collègues, se reportent sur les collègues qui n’en ont pas été lauréat·e·s ou sur des chargé·e·s de cours. Dans le premier cas, la conséquence est un possible éloignement de la recherche pour un temps plus ou moins long ; dans le second, outre le temps passé à rechercher et recruter des chargé·e·s de cours, c’est la chaîne administrative dans son ensemble qui est touchée, du recrutement proprement dit au paiement des personnes. À titre d’exemple, en 2021-22, ce sont ainsi environ 150 semestres qui ont été octroyés au titre de ces dispositifs au sein de l’Université de Lille. En admettant que l’on accorde un support d’ATER de 6 mois par semestre de recherche octroyé, ces allégements de service au titre de la recherche, dont l’Université se réjouit évidemment pour les collègues (et pour la recherche), pourraient coûter à l’établissement quelque 2,8 millions d’euros cette année, déduction faite des compensations reçues. On retrouve ici la même schizophrénie que celle que nous avons pointée dans la note sur les moyens récurrents : si l’on améliore, on dégrade.

Ce sont ces restrictions et ces obstacles qui limitent ou affaiblissent les dynamiques déjà à l’œuvre ou les projets envisagés que le collectif SERVIR entend combattre pour que la recherche soit à nouveau portée par une université ambitieuse qui se donne les moyens d’encourager les initiatives de ses chercheurs et chercheuses, et se dote des moyens nécessaires pour atteindre les objectifs de réussite qu’elle se fixe, sans oublier la valorisation sociétale de notre recherche face aux défis actuels et à venir.