Simplification et subsidiarité

Où en sommes-nous ?

Une fusion non encore achevée

L’expérience des universités fusionnées (Université de Lorraine, Aix-Marseille Université, Université de Strasbourg) montre qu’il faut six ans pour qu’une fusion soit considérée comme aboutie, car, pour construire une université à partir d’établissements antérieurs, il faut commencer par déconstruire. Or, notre Université, dans son périmètre actuel, n’a que quatre petites années, dont un an et demi perturbé par la crise de la COVID 19.

Nous sommes par conséquent au milieu du gué : la phase d’acculturation mutuelle entre les trois ex-lilloises qu’est venu rejoindre l’INSPÉ au 1er janvier 2020, est en cours d’achèvement. Nous commençons à parler un langage commun et à utiliser des outils partagés, ce qui a nécessité un gros travail d’adaptation de la part de toutes et tous, en particulier les collègues BIATSS. Sans prétendre ici à l’exhaustivité, et en laissant délibérément de côté tout ce qui concerne la formation et la recherche :

  • langage commun avec en matière RH et de qualité de vie au travail, un certain nombre de mesures, plans ou chartes garantissant une équité de traitement des personnels. De façon non exhaustive :
  • mise en place, en 2019, d’une cartographie évolutive des fonctions et régimes indemnitaires des personnels BIATSS titulaires ;
  • mise en place, à compter de 2020, de règles communes en matière de référentiel des équivalences horaires pour les enseignants et enseignants-chercheurs ;
  • adoption, par le conseil d’administration au printemps 2021, d’une charte des personnels BIATSS non titulaires assortie de la mise en place d’un régime indemnitaire pour les contractuels BIATSS sur besoin permanent, d’un schéma pluriannuel handicap 2022-2025, et d’un plan d’égalité professionnelle Femmes/Hommes ;
  • adoption de lignes directrices de gestion (LDG) communes à toute l’Université, instituées par la loi de la transformation de la fonction publique d’août 2019, en matière d’avancement et de mobilité ;
  • adoption récente d’une politique du droit à la déconnexion ;
  • refonte complète de la rubrique « qualité de vie au travail » de l’ENT, dans une logique centrée sur l’utilisateur et non plus dans une logique servicielle et lancement, en novembre 2020, d’une Newsletter thématique Act’ULille action sociale ;
  • langage commun en matière de vie étudiante et en matière de relations internationales avec l’instauration de commissions d’établissement représentatives de l’ensemble de la communauté universitaire permettant de sélectionner les candidatures aux différents dispositifs de ces deux champs ;
  • langage commun avec l’instauration d’une maison de la médiation et d’une cellule « harcèlement » commune aux étudiant·e·s et aux personnels ;
  • langage commun dans les outils, avec le déploiement, en cours, d’un système d’information (SI) commun performant et interopérable, là où existaient des systèmes d’information différents, lorsqu’ils existaient.
    On mentionnera ici le projet SINAPS, sur lequel notre Université travaille depuis plusieurs mois. Ce projet est une solution technique développée nationalement pour outiller une démarche de gouvernance des données. Cette solution comprend deux volets : (i) l’un permet la gestion des données de référence du SI en assurant leur cohérence dans les différentes applications ; (ii) le second automatise les échanges de flux entre ces applications, donc sans re-saisie des données. Ce projet permet en outre de constituer un socle de données préalables à l’élaboration d’indicateurs transparents de pilotage.

Depuis sa création, l’Université de Lille a par ailleurs établi un certain nombre de partenariats avec son écosystème, valant pour l’ensemble de ses entités et anticipant, pour certains d’entre eux, la structuration de notre Université dans son contour à partir de 2022 :

  • convention avec la MEL signée en 2019 ;
  • convention avec le CNRS signée en 2021 ;
  • très nombreuses collaborations avec la Région, dans presque tous les domaines de compétences de l’Université ;
  • mise en place d’une conférence régionale des présidents d’université (CRPU) avec les quatre universités publiques du territoire ;
  • etc.

Tout ce qui précède s’est fait dans un tournis de réformes exogènes qu’il nous a fallu mettre en place dans l’urgence et parfois sans bonne visibilité :

  • Parcoursup,
  • Bienvenue en France,
  • Loi pour l’Orientation et la Réussite des Étudiants (ORÉ),
  • nouvelle procédure de recrutement en master,
  • réforme de la formation des enseignants (masters MEEF : métiers de l’Enseignement, de l’Éducation et de la Formation),
  • réforme des études de santé,
  • création des BUT (Bachelor Universitaire Technologique),
  • réforme de la formation professionnelle.

Dans ce temps court, nous avons également répondu à une commande de l’État : mettre en place un Établissement Public Expérimental (EPE), si nous voulions avoir quelque chance d’être lauréat de l’I-Site début 2022. L’EPE est désormais créé par décret : à compter du 1er janvier 2022, outre ses onze composantes de formation actuelles, l’Université de Lille rassemblera en son sein l’École Nationale Supérieure des Arts et Industries Textiles (ENSAIT), l’École Supérieure de Journalisme de Lille (ESJ), l’École Nationale Supérieure d’Architecture et de Paysage de Lille (ENSAPL) et Sciences Po Lille.

Notre projet

Alors que (à moins que ce ne soit parce que ?) le travail mené par chacune et chacun, quelle que soit sa fonction dans l’Université, a été proprement remarquable, les sentiments qui prévalent en cet automne 2021 sont insatisfaction, épuisement, lassitude, perte de sens. Les irritants du quotidien prennent le pas sur le travail formidable qui a été accompli depuis le 1er janvier 2018. Et ce à quoi nous aspirons toutes et tous, c’est d’arriver à de la stabilité, que tout ce qui peut être simplifié le soit. Bref, cessons d’être nos propres bourreaux et redonnons du temps au temps.

Ne pas abandonner notre Université au milieu du gué 

« SERVIR l’Université de Lille » estime qu’il est de sa responsabilité collective de ne pas balayer d’un revers de manche le travail formidable, d’un point de vue quantitatif et qualitatif, effectué depuis près de quatre ans par l’ensemble des membres de notre communauté universitaire, quelle que soit sa fonction : maintenant que la phase de construction est bien entamée, il est indispensable de mener à terme les grands chantiers engagés, sans pour autant s’interdire d’infléchir tout ce qui doit l’être. Quelles que soient les compétences de ses membres, une équipe présidentielle totalement rénovée sera dans l’incapacité matérielle de reprendre ces chantiers, si tant est qu’elle le veuille, en un temps court. Quant à déconstruire ce que nous avons mis à construire collectivement pendant ces quatre dernières années, c’est un choix, que les électeurs et électrices peuvent faire, mais que notre collectif ne cautionne pas.

Dans le même temps qui lui faut terminer les chantiers engagés, notre Université doit se recomposer sous le statut d’Établissement Public Expérimental.

Elle n’y parviendra pas sans une solide colonne vertébrale, qui tient l’ensemble du corps (chartes, culture et langage commun, valeurs partagées…), ce langage commun qui nous unit et qu’il conviendra d’étendre aux établissements-composantes.

Ces derniers, tout comme les onze composantes de notre future Université, seront sensibles à ce que leurs personnels et leurs étudiant·e·s puissent bénéficier des avancées réalisées depuis 2018 dans l’actuelle Université de Lille sur le plan des ressources humaines, de la qualité de vie au travail et dans les études (service commun d’action sociale, activités culturelles, activités sportives…). Il nous faut donc faire « Université » : un tel établissement, fût-il expérimental, ne peut se piloter sans une méthode partagée avec l’ensemble des composantes et des établissements-composantes. Tout ne se fera pas en un jour, ce process est en construction. Nous visons l’amélioration continue, sans rupture mais volontaire pour faire évoluer le quotidien de chacune et chacun, quel que soit son statut.

Le temps de la simplification est par ailleurs venu : pour simplifier, il fallait parler un langage commun. Or, ce langage, nous le parlons désormais.

La simplification passe également par un modèle de gouvernance rénové : nombre de vice-présidentes et de vice-présidents réduit, évitement du travail en silo, statut de chargé·e de mission clarifié, comitologie allégée.

Et la subsidiarité dans tout cela ?

À partir de 2022, la présidence de l’Université aura pour mission principale d’être garante de la stratégie de l’établissement dans son ensemble, de la sécurisation des actes et de l’équité de traitement entre structures et entre personnes, étudiant·e·s comme personnels. Les composantes et établissements composantes auront la charge de coproduire cette stratégie, de la décliner dans leur champ propre et de la mettre en œuvre.

La subsidiarité, définie comme la prise de décision ou la réalisation d’une tâche au bon niveau dans l’objectif d’améliorer le service rendu et de redonner du sens à des activités actuellement cloisonnées et parcellarisées et de redonner du temps au temps, n’est pas antinomique de ce qui précède, tout au contraire. Il ne s’agit pas ici de constituer autant d’établissements qu’il y a de composantes et d’établissements-composantes, mais bel et bien de mettre sur pied une nouvelle Université de Lille, avec une stratégie et des garanties communes.

Cette logique de subsidiarité participe par ailleurs de la démarche de simplification, et repose fondamentalement sur un contrat de confiance et de responsabilisation des acteurs dans une stratégie d’établissement partagée. Elle est un moyen de simplifier l’exercice des responsabilités, en raccourcissant les circuits de prise de décisions et de leur mise en œuvre. Elle doit par ailleurs définir les moyens à accorder à chaque niveau pour une efficacité maximale.

Une phase expérimentale du projet « Subsidiarité » a débuté en janvier 2021 avec six composantes volontaires (FSJPS, FST, Humanités, INSPÉ, Polytech Lille, UFR3S). À ce jour, la « phase de dimensionnement », destinée à estimer la charge de travail et les compétences actuellement mobilisées pour la réalisation de nos activités dans les grandes directions et pouvant l’être à l’avenir en composante, se termine. Il s’agira, à partir de 2022, de doter les composantes entrées dans l’expérimentation des moyens humains et/ou des compétences leur permettant de faire face à de nouvelles tâches et de généraliser le projet à l’ensemble des composantes de notre Université.

Voici quelques exemples parmi d’autres de ce à quoi tend le projet « Subsidiarité » :

i) Au niveau du renforcement des services administratifs et techniques des composantes, faire en sorte que celles-ci soient dotées, par une déconcentration des moyens, de services de relations internationales, de formation continue, de communication, de scolarité et de logistique leur garantissant une véritable capacité d’agir à leur niveau, en rapport avec l’élargissement des compétences et des activités qui leurs sont confiées, et de leur capacité à en décider.

ii) Au niveau de la construction et de l’évolution de l’offre de formation – en particulier lors des campagnes d’accréditation -, fournir à chaque composante un cadrage ex-ante de l’enveloppe d’heures sur laquelle elle peut compter, sur la base d’un modèle d’attribution des heures simple et transparent, défini de manière concertée au niveau de l’établissement.

iii) En matière de Ressources humaines, évoluer progressivement vers un modèle d’attribution des moyens sous forme d’évolution de la masse salariale, laissant plus de latitude aux composantes, dans le cadre du dialogue de gestion, pour choisir les postes qu’elles jugent prioritaires pour leur développement.

iv) En matière de Vie étudiante, allouer à chaque composante, sur la base de critères partagés, une enveloppe CVEC qui lui permette d’améliorer la vie étudiante.

La méthode

La démarche de simplification doit être un projet d’établissement : c’est la raison pour laquelle nous n’en ferons pas l’objet d’une vice-présidence spécifique, car, en procédant ainsi, le risque est de dédouaner les autres vice-présidences de cette exigence de simplification.

Le travail sur la subsidiarité engagé avec les composantes-pilotes a déjà été l’occasion de mettre à plat un certain nombre de procédures pouvant être simplifiées, tout en garantissant la sécurisation des actes. Ce travail avec les acteurs et actrices de terrain sera poursuivi sous une forme restant à définir ensemble. Doivent par ailleurs être absolument associés à la démarche les étudiant·e·s ainsi que les acteurs de notre écosystème.

La démarche suivie dans le réseau « Amélioration continue et qualité » d’essaimage de bonnes pratiques et de partage d’expérience, lancé en décembre 2019 et porté politiquement par Georgette Dal, sera étendue.

Le travail de communication sur les procédures et dispositifs existants doit par ailleurs être renforcé, en collaboration avec les composantes et établissements-composantes.